« Eh oui,
moi je suis allée jusqu’au certificat d’études ! »
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« Eh
oui, moi je suis allée jusqu’au
certificat d’études ! », affirme
avec aplomb Claude Mioche en vous
plantant ses yeux bleus perçants dans
les vôtres. Plus connue sous le nom de
Coco, cette doyenne de Saint-Saturnin se
dresse fièrement, du haut de son mètre
55, dans la cuisine de sa vieille
maison, au clos d’Issac.
Née Claude Mye, la Coco est une créature
Saint-Saturninoise pure souche, grâce à
ses grands-parents paternels qui
s’étaient installés au Lac d’Espirat,
une ferme située en hauteur, à quelques
kilomètres du village. A partir de ses
6 ans et ce jusqu’à ses 14 ans, elle
fréquente l’école des filles à
Saint-Amant. Pendant ses études, elle
loge à Saint-Saturnin même, chez une
tante place de l’Ormeau, et ne revient
au Lac que pendant les vacances. Une
fois sortie de l’école, elle retourne à
la ferme pour aider ses parents et
s’occuper de ses nombreux frères et
sœurs. Sa scolarité est toutefois
interrompue par un événement majeur : la
Seconde Guerre Mondiale. Coco a alors 9
ans. Les Allemands viennent jusqu’au Lac
pour régler leur compte aux maquisards
qui viennent s’y terrer. La famille Mye
s’efforce de rester en dehors du conflit
et de ne pas paraître suspecte aux yeux
des soldats allemands, mais lorsqu’un
résistant blessé frappe à sa porte, elle
n’hésite pas à le soigner. Coco a peur,
et affirme aujourd’hui que si elle et
ses proches ne s’étaient pas cachés dans
la campagne environnante, l’ennemi
aurait incendié la ferme. Des années
plus tard, la petite fille devenue
adulte participe activement au jumelage
qui lie Saint-Saturnin à Jettenbach,
notamment en hébergeant des Allemands
chez elle.
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Elle se
marie à 35 ans avec Robert
Mioche, qu’elle connaissait
depuis toute petite. S’ils n’ont
pas eu d’enfants biologiques,
ils ont, dans leur cœur, adopté
de nombreux fils et filles. Coco
s’est en effet occupé d’une
dizaine d’enfants ; frères,
sœur, neveux, nièces,
petites-nièces, ce qui l’a
conduit à habiter aussi en
Bretagne et en Région Parisienne
: toutes et tous ont en partie
été élevés par cette battante
Aujourd’hui, à 88 ans, elle n’a
rien perdu de sa fougue et de sa
vivacité. On n’est pas toujours
sûr de la trouver chez elle :
elle peut tout aussi bien être
partie rendre visite à son frère
à la maison de retraite,
travailler son jardin ou boire
l’apéro chez des amis (parce
qu’un petit Ricard, « ça
fait pas rien »).
Et, de temps en temps, elle va
voir son docteur... pour
s’assurer qu’il va bien !
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Tout au long de
sa vie, elle n’a pas chômé au sein de
Saint-Saturnin. Tour à tour employée au
service « Chez
l’Angélina » (l’actuelle Toison
d’or), « Chez Chambon » (aujourd’hui le Bistrot d’ici), à la foire du 13
octobre, à la Prada ou encore à la
colonie de l’APAS.
Entre deux emplois, elle joue aussi la
comédie, et interprète au château, pour
le son et lumière du Père Finet dans les
années 70, Catherine de Médicis, une
célébrité dans « le pays ».
Son quartier,
Issac, elle en est fière, et c’est de
loin son endroit préféré à
Saint-Saturnin. Dans les années 90, Coco
défend bec et ongle son clos d’Issac à
l’occasion d’Inter-quartiers, événement
où s’affrontaient bien amicalement
déjà
les différents quartiers de
Saint-Saturnin, qui formaient jadis des
hameaux à part entière. Depuis le temps
qu’elle y vit, elle a pu assister à
l’évolution de son pays. Il y a des
décennies de cela, Issac constituait la
frontière du village... Vers le milieu
du XXème siècle, la majorité de la
population était paysanne : ainsi chacun
avait chez soi deux ou trois vaches,
afin de subvenir à ses propres besoins.
S’il y avait beaucoup moins d’habitants
qu’à présent, le village comptait en
revanche bien plus de commerces, dont
une boucherie-charcuterie, deux
épiceries, deux boulangeries, un bureau
de tabac, un restaurant, un café... La
vie des Saint-Saturninois était alors
rythmée par les fêtes locales : on
célébrait la fête de Saint-Saturnin le
15 mai, on dansait au bal des conscrits,
pour encourager ceux qui partaient à
l’armée à 19 ans, « On
faisait parfois la java pendant trois
jours » dixit la Coco (!).
La vie à Saint-Saturnin a certes bien
changé, mais cela n’altère en rien
l’amour qu’éprouve Coco pour son village
adoré, où elle compte bien encore couler
des jours paisibles et heureux...
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