LE PETIT JOURNAL
 

PETIT JOURNAL des Amis de Saint Saturnin – n°13 – janvier 2010
 

 

La tour d'angle ouest du château royal de Saint Saturnin

 La tour d'angle ouest du château est, pour tout observateur un tant soit peu attentif, à la fois remarquable et entourée d'un certain mystère.

Elle est remarquable car c'est la seule tour de ce château à être dotée aujourd'hui d'un couronnement crénelé qui repose en encorbellement sur des consoles de mâchicoulis*. Le mystère naît de cette observation : cet ouvrage serait-il authentique ? Si oui, à quel moment aurait-il été mis en place ? Ou alors, Viollet-le-Duc aurait-il sévi aussi à Saint Saturnin ? Le mystère est renforcé par le fait que cette tour est justement non visible sur la fameuse vue panoramique de Saint Saturnin prise de l'est/sud-est et dessinée dans les années 1450 pour son armorial, par Guillaume Revel, héraut d'armes du roi Charles VII.

Cette tour ne pouvait donc livrer ses secrets qu'à l'issue d'une analyse assez complète et qui s'attacherait en particulier à dater ses superstructures. Les conclusions de cette étude vont battre en brèche la quasi-totalité de l'analyse faite de ce Monument, vers 1958, par G. de Bussac. Elles vont par contre largement renforcer le caractère remarquable de la tour d'angle ouest et lever une grande partie du voile.

Selon MM. Trubert et Corvisier (voir l’encadré) en effet, cette tour d’angle ouest :

« Est une relique du premier château féodal originel » élevé dans la seconde moitié du XIIIème siècle par le baron de La Tour d'Auvergne pour y installer le fief familial.
Voir son plan intérieur circulaire, ses murs
épais, l'absence de fenêtres du XVème siècle

« Est fondée sur le point le plus haut de l'affleurement rocheux naturel ».
Voir son absence de sous-sol

« Fut intégrée à l'angle du corps de logis nord/nord-ouest lors de sa reconstruction dans le premier tiers du XVème siècle »
Voir la datation plus récente du corps de
logis actuel, les adaptations encore visibles
au niveau des caves par exemple, à partir
d''un corps de logis plus ancien, et la façon
dont ce nouveau corps de logis pénètre la
tour du côté où elle était éventrée


Il convient de noter au passage que le corps de logis nord/nord-ouest que l'on découvre aujourd'hui avec ses profonds remaniements du XVIIIème siècle - suppression d'un étage pour rehausser les deux autres et création de larges et hautes baies - est donc celui qui a remplacé au XVème siècle l' originel du XIIIème, qui avait lui-même sans doute trop souffert de la Guerre de Cent Ans.

L'implantation de la tour d'angle ouest et sa prééminence initiale lui aurait confié une symbolique « qui justifie sans doute sa conservation sélective dans le programme de reconstruction du début du XVème siècle ».

Un examen attentif de son couronnement montre alors que les mâchicoulis et le parapet crénelé appartiennent quant à eux à ce même programme de reconstruction et qu'ils n'existaient pas sous cette forme précédemment.

Ils auraient donc été ajoutés à cette époque comme pour « honorer » la tour d'angle ouest dès lors qu'elle avait survécu à la Guerre de Cent Ans, et rappeler qu'elle remontait aux origines du château féodal érigé par les La Tour d'Auvergne.

Gageons maintenant, qu'à l'issue d'un programme de restauration qui ne pourra être mené qu'en soulevant encore quelques belles montagnes, cette tour retrouvera une nouvelle jeunesse qui lui permettra de témoigner sept cents ans de plus, de ses origines aussi lointaines que prestigieuses.

Emmanuel Pénicaud

 
 
Emmanuel et Christine PENICAUD ont confié à M. Michel TRUBERT, Architecte en Chef des Monuments Historiques, l'étude préalable à la restauration des façades, des tours et des murs du château de Saint Saturnin. Elle a consisté en :
- une analyse du bâti afin de le dater, et d'en comprendre les évolutions,
- un état des lieux avec un bilan sanitaire,
- un projet de restauration.
Pour l'analyse du bâti, M.TRUBERT s'est fait aidé de M. Christian CORVISIER, historien de l'architecture et spécialiste reconnu du Moyen-âge.
Cette étude a été subventionnée pour partie par l'Etat et le Conseil Régional. Ses conclusions ont été présentées à la DRAC en octobre 2009 et globalement acceptées.
L'article ci-contre s'inspire très largement des éléments de cette étude.
 

SOMMAIRE  PETIT  JOURNAL