Il faut maintenant
examiner l’origine de cette façon de
voir les choses et pourquoi le chiffre
huit a été choisi plutôt qu’un autre.
Le dimanche
comme jour de culte pour les chrétiens
est le rite le plus ancien du
christianisme. Ignace d’Antioche au Ier
siècle dit : « Ceux qui vivaient
selon l’ancien ordre des choses sont
venus à la nouvelle espérance,
n’observant plus le sabbat mais le
dimanche, jour où notre vie s’est levée
par le Christ et par sa mort ». Dès
le début, on trouve la double idée que
le dimanche est à la fois le premier et
le huitième jour de la semaine : c’est
le premier jour de la semaine juive
basée sur le récit de la création du
monde ; c’est le jour du soleil dans le
calendrier astrologique (étymologie qui
s’est conservée en anglais : Sunday),
d’où l’idée que le Christ est le soleil
de justice.
Huit jours
après
sa mort (Jean 20,26) les apôtres sont
réunis et Jésus leur apparaît ; le
dimanche sera donc la continuation de
cette réunion, sa commémoration, puis
par extension la Pâque hebdomadaire.
S’il est à la fois le
premier et le huitième jour, il est donc
un, il contient tout le cycle (3).
Un autre point historique
important se situe au IVème siècle.
Constantin profitant du fait que le
premier jour de la semaine est vénéré
par les païens comme jour du soleil et
en même temps par les chrétiens, en fait
un jour chômé consacré aux cultes. Cette
initiative va apparaître aux chrétiens
comme une victoire sur le judaïsme, pour
qui le jour sacré est le samedi, jour du
sabbat, donc le septième
jour.
On voit à partir de là s’échafauder
toute une construction théorique en vue
d’expliquer la supériorité du
christianisme sur le judaïsme. De
nombreux écrits montrent la
préoccupation de marquer la fin de
l’ordre juif.
Pour les juifs, Dieu a créé le monde en
six jours, le septième il s’est reposé.
Les chrétiens vont s’appliquer à montrer
que le sabbat est révolu, Jésus en ayant
lui-même montré l’aspect secondaire (4).
Eux, ils ont le Nouveau Testament dont
l’Ancien n’était que la figure. Le
septième jour est celui de
l’incarnation, ce n’est pas un repos
inactif mais un temps consacré qui
succède aux jours profanes, il devient
la figure du monde christianisé. Le
sabbat juif préfigurait le sabbat
perpétuel qu’est le christianisme : tous
les jours de la semaine consacrés à Dieu
et non un seul (3).
Il y a donc nécessité
d’un huitième jour. Ce huitième jour
sera le monde à venir, eschatologique .
Mais comme il est en même temps le
premier, l’idée du Christ alpha et oméga
(5)
vient se superposer : au premier jour de
la création on a la venue de l’esprit,
au huitième jour on aura le retour de
Dieu. D’où l’idée de résurrection liée
au nombre huit.
Si dans l’orient chrétien on en restera
à cette vision symboliste, la tradition
occidentale plus réaliste et historique
va y chercher une clef pour expliquer la
succession des époques et va essayer de
prévoir l’histoire du monde. Des pensées
millénaristes vont se développer,
diviser l’histoire du monde en sept
millénaires, essayer de fixer des points
de repères historiques, prévoir la fin
du monde, etc…
(1)
il s’agit des rosaces en formes
d’étoiles qui font une frise autour de
la partie supérieure du chevet.
(2)
R. Krautheimer : « Introduction à
l’iconographie de l’architecture
médiévale » 1942
(3)
Ouvrage collectif « Le Dimanche » : Lex
Orandi ; Editions du Cerf.
(4)
En ayant par exemple fait des miracles
ce jour-là.
(5)
Première et dernière lettres de
l’alphabet grec, symbole du début et de
la fin. Dans l’apocalypse, Jean parle du
Christ comme début et fin de toute
chose.
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